Remarque: classement des messages

Les messages qui figurent sur la page d'accueil sont classés dans l'ordre inverse de la chronologie, c'est-à-dire les plus récents en haut de la page et les plus anciens en dessous. Leur ordre est chronologique dans les deux onglets concernant la mission en Haïti et ma première année au Tchad. Dans ces deux parties, il est possible de lire les textes à l'écran mais aussi de les télécharger en format PDF...

10 septembre 2012: prise de contact...

Me voici "Gargeoise" depuis une quinzaine de jours. J'avais certes fait des allers-retours nombreux en juin et juillet, mais maintenant, je suis installée... dans cette cité dont les bordures du blog donnent une idée: deux barres d'immeubles qui bornent un parking intérieur. Tel est mon nouvel horizon...
Je découvre une nouvelle vie, bien différente du Tchad, avec en même temps des points communs nombreux. Il est si facile de parler aux gens que l'on rencontre... Par exemple, j'ai eu une conversation qui m'a émue sur le quai du RER (train qui dessert les banlieues de Paris). J'avais fait tomber mon ticket par terre, et un vieux Monsieur se précipite pour le ramasser. Je proteste car je suis plus jeune que lui et trouve que c'est à moi de me baisser. Il prend ma protestation pour une marque de méfiance et me dit avec force : "Madame, n'ayez pas peur, je suis un Musulman propre !" et il insiste pour se démarquer des "faux musulmans qui font des mauvaises choses"... Sa réaction m'a émue car elle fait réaliser le poids de défiance et de stigmatisation que cet homme porte ainsi que beaucoup de ses compatriotes et co-religionnaires. Nous engageons une conversation et il me révèle qu'il est Algérien, en France depuis les années 60, seul ici, sa femme et ses enfants vivant en Algérie. Il rentre tous les ans en Algérie pour les voir mais n'a jamais envisagé de les faire venir, et ne pense pas lui même rentrer au pays. Pourtant, "les choses ont changé en France, avant c'était bien, maintenant, c'est difficile..." Le RER arrive et nous nous séparons.
La semaine dernière, avec Marie-Do (une des deux consœurs avec qui je vis), nous sommes allées manger un couscous dans une famille, d'origine Algérienne elle aussi. Le père était, comme le Monsieur du RER, peintre en bâtiment. J'ai apprécié la grande ouverture humaine et religieuse chez cet homme et sa femme... eux aussi en France depuis bien longtemps.
Garges est une mosaïque de langues, ethnies, peuples et couleurs.Le principal d'un collège disait au cours d'une réunion dans laquelle il avait rassemblé tous les partenaires qui travaillent auprès de ses élèves que ces derniers provenaient de 80 origines différentes...
Personnellement, je découvre progressivement les structures dans lesquelles je vais dorénavant travailler regroupées sous la dénomination "A l'écoute": écoute des parents d'une part, écoute des adolescents d'autre part et encore écoute des partenaires (enseignants, travailleurs sociaux, animateurs) du département du Val d'Oise. J'ai la joie aussi de pouvoir prolonger le travail de formation à la paix en intervenant dans deux écoles  primaires (Garges et Bobigny) auprès des enseignants et dans l'une d'elles des parents. Le vivre ensemble est un défi conséquent dans nos banlieues traversées par des mouvements de violence et des tendance communautaristes... Les atouts comme les difficultés pour construire la paix sont différents de ceux que j'ai rencontré au Tchad, mais il s'agit toujours, au niveau de l'éducation, d'amener à voir chaque personne comme une personne et une personne unique sans se laisser arrêter par les murs de la différence et de l'indifférence, de la fermeture et du non respect.
Voilà un premier écho de ma vie à Garges. Je ne sais pas encore si je reviendrai souvent donner des nouvelles sur ce blog... Le dépaysement est certes moins grand pour moi que la vie au Tchad, et le climat plus supportable, mais les défis à relever ne sont pas plus petits !